Nouveaux outils de sortie de crise pour entreprises en difficulté
Dix-huit mois après le début de la crise sanitaire, on observe que les différentes mesures de soutien de l’Etat aux commerces ont permis de retarder une vague redoutée de faillites commerciales. Paradoxalement, le nombre d’ouvertures de procédures collectives (sauvegarde, redressement ou liquidation) a même considérablement diminué, avec une baisse de 37% entre 2019 et 2020, et de plus de 60% entre le premier semestre 2021 et 2019 (chiffres de l’Observatoire statistique du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce « CNGTC »).
Dans un contexte de plan de sortie de crise et de la fin du « quoi qu’il en coûte », le fonds de solidarité est supprimé au 30 septembre 2021 et la plupart des autres mesures d’urgence prennent fin au 31 décembre 2021 (PGE, prêts FDES, PPE Bpifrance, avances ou prêts bonifiés CIRI). S’agissant plus particulièrement des procédures collectives, la plupart des règles dérogatoires instaurées par les ordonnances de mars et mai 2020, prorogées par la loi ASAP de décembre 2020 (voir en détail Kit de survie Covid-19 : outils pour entreprises en difficulté et procédures collectives) viennent également à échéance au 31 décembre 2021.
En parallèle, de nouveaux outils de sortie de crise ont été mis en place par la loi n°2021–689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, le plan d’action du 1er juin 2021 sur l’accompagnement des entreprises en sortie de crise et la circulaire du 6 août 2021 précisant les modalités d’application du plan d’action.
Parmi ces nouveaux outils, figurent notamment la création d’un comité national à la sortie de crise (présidée par un conseiller national, Monsieur Gérard Pfauwadel) et de comités et conseillers départementaux, l’engagement des experts comptables, commissaires aux comptes, administrateurs et mandataires judiciaires à proposer un diagnostic gratuit simple et rapide, le maintien du numéro unique à destination des entreprises sur les aides d’urgence et l’orientation de sortie de crise, la création d’un fonds de transition pour les entreprises de taille significative, des plans d’apurement des dettes fiscales et sociales etc.
L’accent est mis ci-après sur les outils spécifiques aux procédures préventives (1.) et collectives (2.) des entreprises en difficulté.
1. Une intervention judiciaire plus précoce privilégiant les procédures préventives
- Outils d’autodiagnostic et d’alerte précoce, confidentiels et gratuits mis à disposition par les greffes des tribunaux de commerces, sur place et en ligne via les sites www.prevention.infogreffe.fr et www.tribunaldigital.fr et l’adresse email prevention@tribunal-de-commerce.fr.
- Une information plus précoce du tribunal : pérennisation de la procédure d’alerte renforcée créée par l’ordonnance du 20 mai 2020, dans le cadre de la mission « prévention et relation de confiance » des commissaires aux comptes, tant au regard de la sensibilisation effectuée par ces derniers auprès des dirigeants que de l’information donnée directement au président du tribunal compétent lorsque la situation l’exige. Possibilité pour le président du tribunal, lorsqu’il convoque le dirigeant à un entretien de prévention, d’obtenir les informations prévues par l’article L. 611–2 du code de commerce (renseignements de nature à lui donner une exacte information sur la situation économique et financière du débiteur) sans attendre l’entretien ou le procès-verbal de carence.
NB : ces dispositions sont prévues par l’ordonnance n°2021–1193 du 15 septembre 2021 avec une entrée en vigueur au 1er octobre 2021. - Le mandat ad hoc de sortie de crise : il s’agit d’une procédure amiable simplifiée proposée par le Conseil national des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires (CNAJMJ) afin de faciliter la renégociation des dettes des petites entreprises. Il est destiné aux entreprises employant au maximum 10 salariés et qui rencontrent des difficultés financières en raison de la crise sanitaire et de ses conséquences. Il ne peut dépasser 3 mois et est soumis par ailleurs aux règles du mandat ad hoc classique. Le CNAJMJ a accepté de plafonner la rémunération de ce mandat spécifique à 1.500 € HT pour les entreprises de moins de 5 salariés et à 3.000 € HT pour les entreprises de 5 à 10 salariés. Cette mesure exceptionnelle reste applicable jusqu’au 31 décembre 2022.
- Une procédure de conciliation plus attractive : pérennisation à venir de la suspension de l’exigibilité des créances échues avant toute mise en demeure ou poursuite, qui concernerait également les créances non échues pendant la période de négociation de l’accord. Protection renforcée à venir de la caution en procédure de conciliation, afin qu’elle puisse bénéficier des mesures octroyées au débiteur en application de l’article 1343–5 du code civil, même en cours d’exécution de l’accord de conciliation.
2. La création d’une procédure collective simplifiée pour les petites entreprises : le « traitement de sortie de crise »
Les conditions d’application de cette nouvelle procédure sont les suivantes :
- Petites entreprises dont l’effectif et le bilan sont inférieurs à des seuils fixés par décret et présentant des comptes réguliers, sincères et aptes à donner une image fidèle de la situation financière de l’entreprise. Elles sont en état de cessation de paiement mais doivent disposer de fonds pour payer les créances salariales car l’intervention des AGS est exclue par principe. Elles doivent en outre justifier être en mesure d’élaborer dans des délais resserrés un projet de plan tendant à assurer la pérennité de l’entreprise, car la période d’observation a une durée maximale de 3 mois.
- Désignation d’un seul auxiliaire de justice avec une mission de surveillance (et non d’assistance) s’il s’agit d’un administrateur judiciaire, ou de contrôle du passif (et non de vérification des créances) s’il s’agit d’un mandataire judiciaire.
- Absence de vérification des créances : l’originalité de cette procédure réside dans une inversion totale de la procédure classique. Dans le traitement de sortie de crise, c’est le débiteur qui établit unilatéralement la liste des créances et c’est le créancier qui contestera, le cas échéant, le quantum. Cet outil encourage néanmoins la bonne foi du débiteur car les contestations des créanciers ralentiront l’adoption du plan et celui-ci ne concernera que les créances qui ont été listées et sont nées antérieurement à l’ouverture de la procédure.
- Modalités identiques au plan de sauvegarde : propositions de délais ou remises, absence de réponse vaut acceptation, délai de 30 jours imparti aux créanciers pour répondre.
- Particularités : versement d’au moins 8% du passif dès la troisième annuité et absence de cession de l’entreprise à l’issue de la procédure. Les cautions et garants personnes physiques bénéficient du plan par renvoi des dispositions de l’ordonnance du 15 septembre 2021.
Les acteurs du monde des procédures préventives et collectives se réjouissent d’ores et déjà de l’outil novateur qu’est le « traitement de sortie de crise », qui pourra être sollicité par les entreprises concernées jusqu’au 1er juin 2023. Cette nouvelle procédure, à mi-chemin entre la sauvegarde et le redressement judiciaire, permet un gel rapide des dettes du débiteur, qui peut ainsi sortir la tête de l’eau pour organiser rapidement le règlement échelonné de ses dettes.
Le décret d’application de la procédure de traitement de sortie de crise sera prochainement promulgué et précisera notamment les seuils d’effectifs et de bilans concernés. Il est surtout attendu pour l’articulation avec les autres procédures (redressement et liquidation judiciaire), en cas d’échec de cette nouvelle procédure ou de résolution du plan, notamment au regard des créances listées ou non, contestées et/ou nées postérieurement à l’ouverture de la procédure.
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